La politique est pour certains un sujet tabou, car il déclenche des échanges passionnés et potentiellement violents. Il vaut donc mieux se prémunir de mettre les pieds dans le plat.
C'est pour d'autres un sujet ennuyeux, car redondant et empreint de fatalisme.
C'est encore pour d'autre un sujet passionnant, rempli de l'espoir provenant d'utopies diverses, mais toujours futures.
Que l'on préfère parler de politique au passé ou au futur mais surtout pas au présent est le signe d'un constat sur lequel tout le monde semble se rejoindre : la politique au présent génère un malaise.
D'où vient ce déni de la réalité ? Cette obfuscation de notre quotidien par les regrets des rêves passés et les utopies des rêves futurs ?
Tentative de réponse.
Notamment parce que la politique actuelle est faite de mensonges successifs.
Ce n'est pas systématique, mais les exemples sont nombreux de promesses électorales non-tenues, à tel point que l'on ne semble plus s'en offusquer que par principe. Dénoncer ces mensonges ouvertement peut même vous faire passer pour un naïf tellement le mensonge politique est une évidence admise comme irrémédiable.
Et pourtant ! Il suffirait de sanctionner les hommes politiques pour leurs mensonges, comme nous le faisons dans le processus d'éducation pour les enfants, pour tracer un début de route d'espoir.
Il semble que oui. Nous sommes résignés à accepter que l'on nous mente parce que c'est la norme.
Le problème de la manœuvre c'est qu'en plus d'encourager le mensonge comme quelque chose de bénin, cela mène à mélanger les vrais propositions aux écrans de fumées.
Les vrais propositions, tenues par des gens droits qui essaient de faire leur boulot du mieux qu'ils peuvent, sont noyées au milieu de l'agitation.
Il va vraiment falloir une bonne louche de chance pour piocher un bon numéro dans le lot !
Avant de répondre, il faut définir "meilleur". Meilleur par rapport à quoi ? Cela sous-entend des critères, puis une évaluation, et enfin un classement. La notion absolue de "meilleur" n'a aucun sens.
Dans notre cas, pour une élection au suffrage universel type Présidence de la République, cela pourrait donner :
Malheureusement, tout cela est très théorique.
La théorie veut que le peuple réfléchisse individuellement et collectivement pour décider de ses leader. Il y a un abandon de ce rôle.
A l'inverse, les critères qui semblent rencontrer le plus de succès dans notre monde moderne tiennent du domaine des apparences et des combines/techniques, essentiellement de communication.
La politique est passée du domaine intellectuel au domaine sentimental.
De la facilité.
Bien que nous soyons tous inégaux devant ces deux sesibilités, il est généralement plus simple de convaincre quelqu'un en faisant appel à ses sentiments que de le faire par la pensée.
Le processus de persuasion par cette méthode est facilité par les deux parties :
Le processus étant gagnant/gagnant (en apparence), il remporte l'adhésion immédiate et s'auto-entretien.
La caractéristique commune au genre humain, visible dans la croissance de notre société, est la recherche de l'efficacité. Le but ultime est de faire le maximum avec le minimum d'effort.
Le luxe de nos sociétés modernes est le temps libre pour vaquer à nos loisirs, se dégager de la contrainte du travail.
C'est la recherche du plaisir.
De nos jours, réfléchir aux options, s'investir dans une réflexion, prendre de son temps pour une cause qui n'apporte pas de bénéfice personnel est vu comme une perte de temps.
C'est une des conséquences de l'individualisation de nos comportements.
C'est pour cela que, même si paradoxalement nous n'avons jamais eu autant de temps libre que dans nos sociétés modernes, nous réduisons systématiquement au minimum le temps passé à s'intéresser aux autres et à la société en général.
Le bénévolat, les mêmes causes engendrant les mêmes conséquence, tire tout droit son état actuel de ce processus.
Avoir une approche raisonnée de nos choix politique demande du temps pour s'informer, comparer, analyser, réfléchir et finalement décider.
Tout cela est chronophage et inintéressant car à l'issue de ce processus le gain personnel est négligeable.
Nous cherchons donc à y passer le minimum de temps, en simplifiant nos critères et en allant à "l'essentiel".
Puisque l'approche intellectuelle est trop coûteuse, on se retranche dans un autre domaine qui fait la force des espèces douées d'intelligence : les sentiments.
La politique aujourd'hui est faite de passions, non de convictions.
Le candidat qui remportera l'adhésion majoritaire le fera plus par son comportement que ses actions, par son apparence plutôt que par sa réalité, par la forme plutôt que par le fond.
On peut y comprendre l'intérêt actuel (et croissant) pour les techniques de communication et de marketing.
L'intérêt n'est plus dans le message de nos politiques, mais dans la manière de le présenter pour qu'il soit accepté.
On ne vote donc plus pour un projet mais pour celui qui le porte.
On ne vote plus pour des idées, mais bel et bien pour une personne ou un groupe, une présentation, un slogan, un emballage.
C'est vrai.
Des hommes politique brillants se sont retrouvés sur la touche parce qu'ils avaient du mal sur ce point.
Regardez du côté de Lionel Jospin : malgré un bagage intellectuel incontestable, il a échoué à s'imposer et à faire passer son message. La violence de la "fin" de sa carrière politique est à l'image de l'importance que l'on accorde à la capacité de se vendre en politique.
Mais attention à ne pas renverser les priorités !
Pour utiliser une image consumériste, l'emballage est là pour entourer un produit. De même, la communication et le marketing sont là pour l'appuyer. Mais le fond du problème doit rester le produit lui-même.
C'est exactement la même chose en politique : ce qui compte, dans l'ordre, ce sont :
A force de trop se crisper sur la présentation, le risque est d'en faire l'étape prépondérante.
En théorie oui. En pratique ils se présentent surtout pour être élus.
Le désintérêt du peuple pour la politique a élargi le nombre de candidats ayant une chance de passer le filtre des urnes.
Pire, cette abondance d'apparences, de communication tend à rendre la politique de plus en plus superficielle.
En conséquence, le peuple se distance de ses élites, aggravant encore la tendance. C'est un phénomène qui s'auto-entretien.
Exemples criants qui ont l'air anodins de cette dérive, de jeunes personnes popularisées par les media affirment vouloir prétendre à la Présidence de la République.
Sans avoir de quelconques compétences ou expériences crédibles dans le domaine politique, alors que la fonction nécessite une haute responsabilité, elles utilisent différents prétextes ("des idées", "la parole des jeunes", etc.) pour se valoriser, et font surtout preuve d'un bagage intellectuel peu poussé.
Il y a un terme anglais pour ces personnes : "Famous for being famous" qui restranscrit parfaitement la réalité de ces aspirations et de ces aspirants.
Ces exemples peuvent prêter à sourire (il faut reconnaître que le culot de ces simples esprit peut être divertissant) s'ils n'étaient pas le signe de quelque chose de plus grave.
Ce phénomène de perte des valeurs politiques réduit l'épaisseur/la profondeur de la profession.
Il la banalise au point d'attirer des personnes qui n'ont rien à y faire, car elles ne sont pas passionnées par la chose politique, mais parce ce que la politique peut leur apporter.
La politique atrophiée est la porte ouverte aux crétins qui souhaitent la cannibaliser.
Au fond, ces personnes sont des caricatures de la dérive politique actuelle, et représentent l'extrémité de la tendance actuelle : faire de la politique pour d'autres objectifs.
La prestigieuse Présidence de la République Française est donc convoitée, non pas pour ce qu'elle est ni ce qu'elle exige, mais pour ce qu'elle a à offrir.
On vise la Présidence de la République comme on vise un poste à responsabilité ou même la Présidence et/ou la Direction Générale d'une grande entreprise.
Le but, la finalité, est d'y accéder, alors qu'en théorie l'accession au poste n'est que le début.
Oui, oui, et 3 fois oui.
Si l'on y regarde de plus près, tous les problèmes cités s'enchaînent et s'auto-entretiennent voire s'aggravent. La solution est donc de briser cette chaîne et de rentrer dans un cercle vertueux.
Pour briser le cours des évènements actuels et futurs, il faut en revenir au début de la chaîne : le désintérêt et l'inaction citoyenne du peuple.
Cela commence par des efforts pour réduire la part d'individualisme dans nos comportements et nos décisions.
Beaucoup de problèmes de notre société actuelle pourraient être résolus si l'on daignait penser un peu plus aux autres et un peu moins à soi.
C'est une réaction typique d'individualisme... et d'irresponsabilité.
Se dire que finalement les autres se débrouilleront bien tous seuls et (surtout !) sans moi, c'est avant tout une fuite des responsabilités quand les choses ne vont pas bien. Ce n'est pas très mature !
Ce n'est pas anodin si le droit de vote est aussi un devoir : c'est justement dans un contexte où l'envie de voter est absente qu'il nous faut nos pousser à exercer ce droit.
En tant que citoyen, la politique n'est pas une affaire personnelle.
La politique n'est ni plus ni moins que la définition commune du futur de l'ensemble de la société.
J'insiste sur la double notion de collégialité : nous décidons ensemble pour notre avenir commun.
Il faut donc comprendre le processus démocratique non pas comme l'expression d'une préférence personnelle individualiste, mais celle d'une préférence personnelle pour la société.
Le droit de vote est et reste personnel, nous votons chacun de notre côté et personne n'a le droit de nous imposer quoi décider.
Cependant le débat est nécessaire pour confronter les points de vue et envisager des idées que nous n'aurions pas spontanément eues en restant seul, c'est le sens de la notion de décision collective.
Quoiqu'il en soit, et puisqu'il s'agit d'une décision dont la finalité est collective, nous sommes tous sans exception (donc je m'inclue dans le lot) responsables de son issue.
Si nous ne sommes pas fiers de l'issue d'une élection ou du bilan d'une personne en fin de mandat, il est inutile et destructif de se dédouaner de sa responsabilité ou de la projeter sur d'autres, mais il est constructif de tout faire pour que cela ne se reproduise plus.
Le vote blanc est un autre échappatoire pour notre responsabilité. L'envie de fuir est tenace !
Pourquoi une position si tranchée ?
Premièrement parce que les vote blanc ne font pas partie en France des suffrages exprimés.
Les votes blancs rejoignent en effet les votes nuls et ne sont pas comptabilisés dans le total. C'est donc une opération inutile : autant rester chez soi.
Devraient-ils être considérés comme exprimés ?
A mon sens non car, par définition, ils n'expriment rien. A l'opposé d'un vote exprimant un choix supposé constructif, le vote blanc est purement destructif.
Que se passerait-il si une forte proportion (voire la majorité) des votes étaient blancs ? Une indétermination dangereuse pour nos institutions.
Il s'agit d'une autre facilité : passer l'absence de réflexion/d'intérêt pour la politique comme une grogne auprès des gouvernants.
Il s'agit de se décharger de la responsabilité du marasme politique pour blâmer "les autres", "les politiques".
Le peuple, encore une fois, est seul responsable de la situation. Et nous en faisons partie. A nous, donc, de changer la donne, de renverser la vapeur.
Envisager un idéal est excellent dans un premier temps. Cela nous permet de définir quelles sont nos valeurs et surtout quel poids nous accordons à chacune d'entre-elles.
Il faut cependant ne pas perdre la réalité de vue : l'idéal fait partie des utopies, pas de la réalité.
Savoir transposer nos idéaux dans le réel, en faisant quelques concessions, nous permet d'avancer.
Par exemple, à défaut de pouvoir choisir le meilleur, pourquoi ne choisirions-nous pas le moins pire ?
Le processus n'est pas évident, c'est pour cela que la "campagne" avant une élection existe : son but est normalement avant tout d'informer le peuple sur ses idées et répondre à leurs interrogations.
Comme dans toute chose, dans tout programme il y a une part de "bon" et une part de "mauvais".
Quelle proposition appartient à quelle catégorie ? A chacun d'en juger sur la base de ses critères/valeurs propres.
Rien de tel qu'une dose de réflexion supplémentaire, à son rythme.
Tirer le mauvais cheval n'est pas à redouter, tant est que l'on fait de son mieux pour éviter cela.
En revanche, on est assuré de manquer son coup si on ne fournit pas un petit effort intellectuel.
Donc on a rien à perdre à réfléchir un peu plus, remettre le choix sur la table, changer et rechanger d'avis.
Le seul objectif est d'arriver à une décision finale dans l'urne.
"Voter pour qui ?" est une question mineure
"Voter pour quoi ?" est une question intéressante
"Voter" n'est pas une question !